#19 La misandrie
Ce non problème
J’ai découvert le mot “misandre” quand j’ai commencé à fréquenter des féministes un peu plus radicales que les autres. Certaines assument ouvertement qu’elles sont misandres et qu’elles essaient de se tenir aussi loin que possible des hommes.
Etre un allié, c’est le comprendre et l’accepter.
J’irai même plus loin : je trouve surprenant qu’il n’y ait pas plus de femmes ouvertement misandres. En effet les chiffres nous prouvent que la fréquentation des hommes par les femmes présente un risque non négligeable pour ces dernières.
Quoi de plus normal en ce cas que certaines souhaitent s’en tenir à distance ?
Une chose est sure, j’entends et je lis beaucoup plus d’hommes misogynes que de femmes misandres … et le plus surprenant est que personne ne reproche véritablement aux hommes d’être misogynes alors que c’est une condamnation quand il s’agit des femmes misandres. C’est en faisant quelques recherches sur ce terme que je suis tombé sur un texte de Rokhaya Diallo. Il explique tellement bien les raisons pour lesquelles la misandrie nous choque que je l’ai repris intégralement ci dessous.
“Notre société a adapté ses fondations au confort masculin et tout discours qui l’érafle est perçu comme dangereux. Ce qui bouscule, c’est l’affirmation de femmes s’exprimant avec aplomb sans rechercher l’approbation des hommes.
Notre éducation encourage les femmes à ajuster leurs comportements au souci de plaire et de paraître agréable au regard des critères édictés par les injonctions patriarcales.
Aussi, le fait de concevoir un discours sans prendre la peine de rassurer les hommes quant au fait qu’ils soient aimés ou indispensables est considéré comme une véritable subversion.
Qu’une femme puisse publiquement envisager une vie où elle choisit de réduire les influences masculines, qu’elle refuse de conditionner la formulation de son engagement au confort des hommes, est vécu comme une inacceptable menace à leur position hégémonique. En réalité, cette panique semée par un discours féministe renouvelé n’est que la traduction de la crainte de perdre une position centrale trop peu questionnée.
Étiqueter ce discours du label de la « misandrie » comme s’il était possible de dresser un parallèle avec les forces misogynes est intellectuellement inepte. La misogynie est le fruit d’un système structuré contre les femmes, et ses mots font écho à des violences aussi concrètes que documentées. Par conséquent, les discours sexistes s’inscrivent dans un continuum dont l’aboutissement est le féminicide.
Or, il n’y a pas d’oppression sans pouvoir. Les hommes ne sont pas opprimés du fait de leur genre. La condition masculine n’a jamais été un désavantage qui puisse conduire à un traitement structurellement défavorable. Ni Alice Coffin, ni Pauline Harmange, ni aucune femme ne disposent du pouvoir de produire un rapport de force menaçant au point d’infléchir un système millénaire.”
Rokhaya Diallo, journaliste, autrice et réalisatrice
Fréquenter, lire et écouter des femmes qui ne cherchent pas à préserver le confort moral de leur audience masculine, c’est très sain.
Depuis quelques années, je me suis souvent retrouvé dans cette position : celle d’un spectateur éventuellement gênant et qui, a priori, suscite la méfiance. Ca m’a aidé à penser différemment et à comprendre d’autres points de vue.
Parfois, ça pique. Souvent, c’est très inconfortable.
- C’est une expérience utile parce qu’elle nous enseigne ce qu’est la vie de la plupart des personnes discriminées : se sentir non considéré (au mieux) ou carrément rejeté (au pire).
- C’est une expérience instructive parce qu’elle nous permet de comprendre un autre point de vue, exprimé depuis une situation qui nous est inédite.
- C’est une expérience puissante parce qu’elle est transformatrice : essaie, tu verras !
Quelques comptes à suivre (en vrai, il y en plein d’aures !) :
Violaine de Filipis
Devenir Woke
Alice Coffin
Rokhaya Diallo
Chroniques du sexisme ordinaire
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